Le mineur de Constantin Meunier.
L’avers d’une pièce de cinquante centimes.

La catastrophe du Bois du Cazier, à Marcinelle, survient le 8 août 1956. Elle fera 262 victimes. Elle constituera un électrochoc qui éclairera sur la condition des mineurs, mettant à nu la réalité de la vie des « gueules noires », loin des images d’Epinal. Elle remettra en cause l’accord « charbon » passé avec l’Italie. Ce sera la catastrophe minière la plus dramatique de l’histoire belge.

Elle éclipsera toutes les autres.

Car il y en eut, des catastrophes minières. Depuis la fin de la seconde guerre, l’inventaire est long.

7 mai 1946, Sacré-Français, Dampremy, 16 morts; 17 avril 1952, Puits du Pêchon, Couillet, 10 morts; 21 novembre 1959, Zwartberg, 13 morts; 13 janvier 1953, puits Marcasse de l’Escouffiaux, Wasmes, 17 morts; 26 septembre 1953, Charbonnage de l’Espérance, Baudour, 22 morts; 24 octobre 1953, charbonnage du Many, Seraing, 26 morts; 8 février 1956, Rieu du Cœur, Quaregnon, 8 morts; 11 mai 1962, Petit Try, Lambusart, 6 morts; 8 novembre 1962, Puits du Pêchon, Couillet (encore), 6 morts; 8 mars 1984, Charbonnages d’Eisden, 7 morts.

11 mai 1950, la catastrophe du puits n° 6 de Mariemont-Bascoup, à Trazegnies.

1950. La Belgique est toujours dans la fameuse « bataille du charbon« , menée par son Premier Ministre de l’époque, Achille Van Acker, pour relancer l’industrie et l’économie. Comme la France.

Le 11 mai, il y a exactement 75 ans, c’était à Trazegnies, un coup de grisou faisait 39 morts. Ce jeudi-là, à 9 heures 22, au puits n°6, taille 27 à l’étage 570 mètres du charbonnage de Mariemont-Bascoup.

Sept nationalités sont tragiquement concernées : 22 Belges, 1 Allemand, 4 Polonais, 7 Ukrainiens, 3 Italiens, 1 Français et 2 Russes.

Il y eut deux blessés: un jeune flamand de 17 ans, Julien Roelandt, qui décédera le lendemain de l’accident, et Yvon Sturbois, 15 ans, trazegnien, sérieusement brulé. Seul miraculé, il est mort en 2007.

C’est la deuxième catastrophe minière en termes de pertes humaines, en Belgique, après Marcinelle.

Mais que s’est-il passé?

La veine était très grisouteuse. Alors, on l’avait fermée d’un mur épais, en organisant une évacuation des gaz vers la sortie. Mais bientôt on y constate une baisse de la teneur en méthane. Les ingénieurs font leurs calculs. Et on décide de la réouvrir. Précipitamment, sans doute. Sans toutes les précautions, probablement. La suite, on la connaît. On l’a dite. Pas complètement, il est vrai:  le charbonnage désignera Herman Chapelle, conducteur des travaux, comme seul responsable de l’accident qui le tua avec ses camarades. Il se dit aussi qu’un ingénieur déménagera et qu’un autre se suicidera.

L’émotion fut considérable.

La Reine Élisabeth rendrait visite aux familles endeuillées puis à Yvon Sturbois à l’hôpital, accompagnée de Louis Rayée, Bourgmestre de l’époque.

La complainte

Témoignages de l’époque, les journaux ouvriraient des souscriptions en faveur des familles des victimes. la liste des donateurs était régulièrement communiquée dans leurs colonnes. On publierait une complainte, dérisoire hommage d’un texte de F. Barré, à chanter sur l’air d’ »étoile des neiges », et qui serait vendu 10 francs, au profit des familles des victimes. Des portraits de victimes, des clichés de la catastrophe, des cérémonies funèbres, « offertes par le Journal de Charleroi », accompagnerait cette page de journal. Une association serait créée le 1er juillet 1951, le Comité d’aide aux familles de la catastrophe minière de Trazegnies, pour aider veuves et orphelins. Elle avait
comme président Emile Cornez, Gouverneur de la Province de Hainaut. 

 Les funérailles officielles seront organisées le samedi 13 mai. Le lendemain pour les orthodoxes.

Les 24 victimes qui résidaient à Trazegnies, à une exception près, sont inhumées dans 24 tombes identiques, alignées côte-à-côte, rappelant ainsi leur sort commun.

On ignorait alors qu’on assistait à la tragique répétition de la catastrophe de Marcinelle, faite de l’attente, angoissante et interminable, devant les grilles fermées du charbonnage, tenue par les gendarmes… six ans plus tard, un certain 8 août, Bois du Cazier...

Le Patriote illustré

Un monument, à la « Gloire du Mineur » commémore le drame, place Roosevelt, à Courcelles – dérisoire hommage.

A la Gloire du Mineur Trazegnies-Courcelles Place Roosevelt Source Google maps

Du charbon dans les veines

Ce monde-là – ou cet enfer -, Jean-Philippe Daguerre, l’auteur d’ « Adieu Monsieur Haffmann » et du « Petit coiffeur » le fait revivre, dans son époque. Sa nouvelle pièce de théâtre s’appelle « Du charbon dans les veines« :

J’ai décidé de creuser autour de toutes ces histoires d’amour et d’amitié pour essayer d’extraire une pure humanité de cet enfer sur terre que peut représenter la vie de ces femmes et de ces hommes dans le bassin minier. 

Jean-Philippe Daguerre

1958, à Noeux-Les- Mines, petite ville minière du Nord de la France, entre Arras et Lille. Pierre et Vlad sont les deux meilleurs amis du monde. 

Ils partagent tout leur temps en creusant à la mine, en élevant des pigeons-voyageurs et en jouant de l’accordéon dans l’orchestre local dirigé par Sosthène « boute en train-philosophe de comptoir », personnage central de cette petite sphère joviale et haute en couleurs malgré la poussière du charbon.

Un jour, la jolie Leila apparaît, et vient jouer dans l’orchestre…

Je ne vous ai pas dit que cette pièce, dont il faut surveiller la tournée à venir, et le passage chez nous, a fait le succès du théâtre privé aux Molières 2025, avec cinq récompenses: Spectacle dans un Théâtre Privé; Metteur en scène : Jean-Philippe Daguerre; Auteur : Jean-Philippe Daguerre; Comédienne dans un second rôle : Raphaëlle Cambray; Révélation féminine : Juliette Béhar…

Bernard Chateau,

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