Une journée internationale du hamburger

A quoi peut bien servir la journée internationale du hamburger, et quelle pourrait bien être la noble cause qu’elle défend? On s’interroge.
Photo Mike sur Unsplash
Mais le fait est là, le 13 octobre, à la Saint Géraud, c’est… la « Journée internationale du Hamburger »…
Une journée internationale du hamburger…
Déjà qu’on en bouffe partout dans le monde ! Mais pour le reste, on a oublié qu’il vient d’Hambourg ! Qu’il a pris le bateau vers les Amériques au XIX° siècle ! D’où il a envahi l’Europe en retour ! Et qu’il sert à comparer le coût de la vie à travers le monde ! Et qu’il incarne à lui tout seul, toute la mal-bouffe!
Franchement !
Une Journée Internationale du Hamburger !
Il ne suffit pas qu’il y ait 1,7 milliard de hamburgers consommés en France en 2019 soit plus de 25 par personne sur toute l’année ou deux par mois ? Déjà que le hamburger y a supplanté le jambon-beurre ! Et qu’en 2019, un Belge sur dix mangeait au moins deux fois par semaine dans un fast food !
Une journée internationale du Hamburger ! C’est ça, un signe que la fin du monde est proche?
Et si on parlait « boulettes »
Si au moins on avait vu large ! Si on avait décrété une « Journée internationale de la boulette ».

Ah ! la boulette ! Elle aussi existe partout dans le monde. Mais elle est loin d’être un produit standarisé, formaté, si ce n’est par la forme – et encore, elle varie en grosseurs. Partout, elle a développé ses particularités, ses spécificités locales. Dans chacune de ses régions d’implantation, elle est composée, épicée et cuisinée différemment. Elle s’est diversifiée.
Pour mieux plaire, elle change de nom. Rien que chez nous : Boulettes ! Bollekés ! Vitoulets ! Fricadelles, qu’on ne confondra pas avec la fricandelle, en forme de saucisse ! Et même vitoulets de baudet, à Charleroi ! Boulèts ! A la liégeoise, bien sûr, qui bénéficient des appréciations très sérieuses de joyeux critiques gastronomiques bienveillants, qui sillonnent la ville chaque année pour identifier les meilleurs!
Mais elle change d’abord d’ingrédient, en même temps que de nom, à travers le monde: Meat balls, keftas, bitterballen, köttbullar, chiftelles, nem nuong, frikadeller, tsukune, kube, germknödel, koffë… Et on en passe.
Boulettes de poulet à l’île Maurice ou façon thaï, Lahmé bil karaz ou boulettes d’agneau à la cerise en Syrie, boulettes de boeuf en Amérique, boulettes de porc ou de veau, à moins qu’on ne les mélange, boulettes de viande d’âne ou de cheval et de porc, qui justifie l’appellation de « vitoulet de baudet » à Charleroi, boulettes de poissons aux Antilles, les fameux acrras de morue, ou d’anguilles en Chine, mais aussi boulettes de pois chiches au Liban, boulettes de pommes de terre dans la région de Thuringe, en Allemagne, boulettes de farine azyme, kneidalah, israéliennes, boulettes de courgettes en Grèce… on en passe encore.
Les accompagnements trahissent les préférences du coin. Des frites ici, du riz ailleurs, ou des pâtes, en sauce ou et en 0ccitanie, les boules de picoulat sont accompagnées des moungettos, qui font les meilleurs cassoulets.
Quand William Duncker donne sa définition du hamburger
Et puis, un hamburger, qu’est-ce que c’est ? « Un vitoulet spotchi eyé stitchi din in pistolet !« , chantait non sans raison l’ami William Duncker, dans son album « Condroz et western ».

On m’dira t’egzadjeres,
Mins Godom! èn amburger,
Ca n’est k’on vitoulet
stitchî dins on pistolet.
On ne dira, tu exagères,
Mais enfin, un hamburger,…
William Dunker « Condroz Western
« … un hamburger, ce n’est qu’une boulette,
entée dans un petit pain… ».
William Dunker dans Condroz & Western
Boulette salée, boulette sucrée: la couille de Suisse
Et puisque la Journée Mondiale du Hamburger nous donne l’occasion de célébrer la boulette, il faut suivre Jean-Noël Escoffier, qui est aussi directeur conseil dans le digital. Il vit à Lyon. Et son dada, c’est la cuisine populaire, et notamment la boulette. Il est même l’auteur du livre « Autour du monde en 80 boulettes, recettes salées, sucrées et végétarienne »– Edition Flammarion.
Alors, parmi ses découvertes, on pointera : la couille de suisse, si bien de chez nous.
Voir dans cette pâte, essentiellement à base de farine et de levure, pochée dans l’eau bouillante, et servie avec de la cassonade brune et du beurre noisette, un fleuron de la gastronomie wallonne serait excessif. Mais on ne peut passer sous silence une tradition culinaire qui remonte au Premier Empire, transmise par une garnison suisse stationnée aux alentours de Bavay, aujourd’hui défendue par une Confrérie, fières de ses « persona honoris couilla ». La Confrérie des Compagnons de la Couille de Suisse, laquelle a son siège à La Louvière, et qui la défend avec la conviction qu’elle mérite, riche de son rituel : « Helvético, décroche-nous cette couille » lance le Président de la Confrérie. Et le garde suisse de monter à l’échelle pour décrocher son trophée et l’exhiber fièrement : « Touchez la couille. C’est un an de bonheur », conclut le Président.
On l’a compris, la… couillonnade joyeuse n’est jamais loin, quand il est question de couille de suisse, qui pourrait inspirer les plus intrépides gourmands.
Mais « couillonnade » n’est incompatible ni avec une approche tout à fait sérieuse, ni avec une renommée internationale, ni avec une renommée internationale qui s’exprime tout à fait sérieusement, comme on le découvre dans le très sérieux quotidien français « Libération« …

Dans les Annales du Cercle d’histoire d’Anderlues, « ‘A la rencontre du passé », on découvre, dans la livraison n° 3, la recette des couilles de suisses, ou « Couyes de suisses ».
INGREDIENTS
30 g de levure fraîche
2 dl d’eau
400g de farine
2 œufs
une pincée de sel
20 g de beurre
POUR SERVIR : beurre fondu et cassonade à volonté
• Délayez la levure dans l’eau tiédie
• Versez la farine dans une terrine, faites un trou au milieu
• Versez-y la levure délayée, ajoutez les œufs, le sel et le beurre.
• travaillez la pâte jusqu’à ce qu’elle devienne lisse et élastique
• Formez des boulettes et laissez lever 1 heure dans un endroit tiède.
• Quand les boulettes ont doublé de volume, jetez-les dans de l’eau bouillante
et faites pocher (2 ou 3 à la fois) pendant 5 minutes environ en les
retournant pour que les couques cuisent de tous les côtés.
• Continuez la cuisson à l’eau en la laissant rebouillir à chaque fois.
• Egouttez-les et servez avec du beurre fondu et de la cassonade.
Et pour le reste, si on faisait une « journée mondiale sans Hamburger » ? Ou alors, plutôt, une année mondiale des boulettes ? Ou des vitoulets… Ou… (voir plus haut).
Bernard Chateau,